La fille qui n’aimait pas trop les nalyses de go-home shows

Il n’y a pas d’innocent. Seulement différents degrés de responsabilité.

Lisbeth Salander

 

Quand McOcee est à la bourre dans sa livraison de nalyse de show, elle invente un truc pour essayer de détourner l’attention. Cette fois-ci, elle a prêté son clavier à un vieux pote Suédois décédé. 

 

 

Ça, c’est quand on lui a dit qu’elle était de perm’ le weekend du premier mai et qu’en plus, elle était de nalyse d’un go-home show de trois heures.

 

 

Au début, on dirait que c’est pas la nalyse de Raw du 23 avril mais en fait si.

 

Il n’y a pas d’innocent. Seulement différents degrés de responsabilité.

Lisbeth Salander

 

Quand McOcee est à la bourre dans sa livraison de nalyse de show, elle invente un truc pour essayer de détourner l’attention. Cette fois-ci, elle a prêté son clavier à un vieux pote Suédois décédé. 

 

 

Ça, c’est quand on lui a dit qu’elle était de perm’ le weekend du premier mai et qu’en plus, elle était de nalyse d’un go-home show de trois heures.

 

 

Au début, on dirait que c’est pas la nalyse de Raw du 23 avril mais en fait si.

 

 

Makössi écrasa rageusement sa cigarette dans une cannette de coca vide faisant office de cendrier et se décida enfin à quitter le confort douillet de son lit king size. Elle était furieuse et les deux billes noires qui composaient son regard menaçant en attestaient bien mieux que toute autre manifestation de colère chez un individu normal.

Fichu Super Äxl, il s’était bien foutu de sa gueule ; et s’il y avait quelque chose que la jeune fille détestait, c’était bien qu’on se foute de sa gueule. Elle revoyait parfaitement le visage simiesque de son compagnon lorsqu’il lui annonça la nouvelle d’un air faussement naturel et enjoué.

– Désolé Makö, tu vas devoir te débrouiller toute seule ce week-end, il faut absolument que je suive cette piste berlinoise. Tu sais très bien que je préfèrerais bosser avec toi, mais si la mort de Knut est liée à notre affaire, c’est le jackpot assuré, poupée !

Malgré ses réflexes affutés, Äxl n’eut pas le temps d’esquiver le coup et se mangea un violent uppercut dans les côtes. Makössi ne supportait pas qu’on la traitre de poupée. Ni qu’on se foute de sa gueule.

Notre affaire. Trois ans qu’Äxl et elle travaillaient d’arrache-pied pour débusquer le plus parfait salopard que la jeune fille ait jamais croisé. Et elle en avait croisé quelques uns. Trois ans et toujours pas le début d’une preuve solide qui leur permettrait de faire boucler cette ordure de Vince McMahon.

 

*

 

A l’aéroport de Stockholm, Äxl attendait patiemment que la porte d’embarquement soit enfin ouverte en dégustant une banane. Il observait distraitement sa ravissante épouse courir derrière le petit qui ne tenait pas en place et semblait bien décidé à ne rien rater du spectacle de ces avions décollant et atterrissant dans un tonnerre assourdissant. Il réfléchissait à leur affaire.

Déjà trois ans que le célèbre journaliste traquait le vieux porc, le patriarche de la WWE et à ce jour, il n’était toujours pas en mesure de prouver quoi que ce soit susceptible d’envoyer cette immonde crevure derrière les barreaux pour le restant de ses jours. Trois ans que Makö et lui passaient chaque jour, des heures et des heures à reconstituer la vie trouble de ce richissime homme d’affaire et celle de son clan composé pour l’essentiel de son beau-fils et de sa fille ; trois ans qu’il se cassait les dents sur une enquête qui n’avançait pas assez vite à son goût.

Putain, déjà trois ans ! Super Äxl, jamais ce fichu surnom ne lui avait paru si ridicule. Malgré toute son intelligence, malgré l’implication de toute son équipe et les surprenants talents de Makössi, l’investigation semblait au point mort.

En pensant à la jeune fille, le remord l’assaillit soudain. Il n’avait pas osé lui dire la vérité sur son week-end et avait estimé plus prudent de lui mentir. Il sourit en repensant à son argument en béton. Makö était tombée dans le panneau et ne saurait jamais rien de la réalité de son voyage. L’avion avait du retard ; il se resservit une banane en réprimant un petit rire nerveux.

 

*

       

La piste Knut. Makö était furax mais elle n’en voulait pas à Äxl. Il lui avait menti, par lâcheté. Pas pour lui faire du mal. Il ne lui avait pas fallut dix minutes pour s’en assurer, le temps d’accéder à son serveur en Hollande, de pénétrer en douce sur l’ordinateur de son ami journaliste et de consulter sa boite d’emails personnels. Bingo, mercredi 25 avril, un message de Madame Äxl ne laissant pas de place aux doutes :

Je te préviens Äxl, ça fait des semaines qu’on promet au petit d’aller au zoo de Berlin et je me contrefous de ton enquête et des humeurs de ta copine tarée. C’est elle ou moi.       

Super Äxl avait cédé et elle ne le méprisait même pas pour cela. Si elle n’avait jamais compris ce qui pouvait pousser deux êtres humains à se marier, elle avait appris à respecter les codes aliénants de cette institution bourgeoise, passéiste et réactionnaire.

Une heure du matin à sa montre et elle n’avait toujours pas commencé son boulot du week-end. Elle tournait en rond dans son immense loft lorsqu’elle décida qu’elle avait terriblement envie de baiser. Elle s’empara de son téléphone et composa le numéro de Säräh Gatinöffsson, sa maitresse occasionnelle. Première sonnerie, Makö pense aux seins fermes de la jeune fille ; deuxième sonnerie, Makö visualise parfaitement les dessous de cuir de sa compagne. Troisième sonnerie, Makö ferme les yeux, elle pourrait presque sentir sous ses doigts les menottes et le petit canard jaune Sonia Rykiel de Säräh ; Quatrième sonnerie, bordel, elle a VRAIMENT envie de baiser ; Cinquième sonnerie et… meeeeeeerde, putain de répondeur !

Elle essaya de se calmer en imaginant Äxl attaché à un lit, la suppliant de ne pas le torturer avec cette foutue aiguille de tatoueur qui avait fait bien des ravages quelques années auparavant. L’image l’apaisa un peu et elle alluma enfin son MacBook Pro en grommelant des menaces incompréhensibles à l’encontre de son ami journaliste.

 

*

 

En attachant sa ceinture de sécurité, Äxl ne put s’empêcher de se sentir vaguement inquiet. Il n’aimait pas laisser Makössi toute seule, cette fille était décidément bien trop incontrôlable pour être livrée à elle-même pendant quelques jours. S’il n’avait jamais vraiment compris pourquoi les juges et les pédo psys avaient décidé une mise sous tutelle à sa majorité, ni pour quelle raison elle avait passé une grande partie de son adolescence en HP, il savait en revanche de quoi la jeune fille était capable. Comme lors de cette conférence de rédaction où la discussion avait pris une tournure politique. Björn Tëdëhess venait d’intégrer l’équipe du journal et avait affirmé crânement que, de son point de vue, Marina Le Pensson apportait de mauvaises réponses à des questions le plus souvent pertinentes. Personne n’avait eu le temps de réagir ; en un dixième de seconde, Makö avait bondi de son siège où elle semblait somnoler, avait écrasé sa cigarette sur le dos de la main du jeune journaliste et s’acharnait sur lui à coups de cendrier.

Une autre fois, il fallut l’intégralité des éléments masculins de la rédac’ pour sauver la peau de Lars Kokösson. En défendant le retrait de la « miz girl » de la bannière du site du journal, le sudiste avait déclenché la fureur de Makö et risqué inutilement sa vie. Il en était persuadé, ce jour-là, elle l’aurait étranglé avec son foulard noir à têtes de mort si personne n’était intervenu. Äxl soupira et planta nerveusement ses dents dans la chair d’une banane tandis que l’Airbus A320 quittait la piste de l’aéroport de Stockholm, direction  Berlin.

Ce week-end en famille était censé le décontracter, mais il ne parvenait pas à sortir de son affaire. La mine sombre, il n’arrivait pas à comprendre ce qui clochait dans son enquête. Vince McMahon était une véritable Ordure, avec un grand O. Putes, jeux clandestins, came, combats truqués, meurtres… pas une activité illégale particulièrement dégueulasse ne manquait au curriculum vitae de ce salopard. Et pourtant, Äxl n’avait pas découvert le moindre commencement de preuve.

Il faisait confiance à sa source, il SAVAIT que le vieux patron de la WWE était le pire criminel qu’il ait jamais affronté. Mais il ne pouvait rien prouver, rien publier sur la foi d’une seule et unique source. Il avait payé une fois très cher une connerie de ce genre et n’avait pas l’intention de recommencer. Oh bien sûr, il était tout de même parvenu à sortir quelques broutilles, quelques articles, comme celui dénonçant les dérapages homophobes de la WWE, ou celui sur les liens étranges existant entre la Compagnie et l’armée américaine, ou encore sur le traitement particulier de la question noire à la WWE… Tout cela, il l’avait publié, dénoncé, prouvé. Mais ça ne pesait pas lourd au regard de la liste des crimes de Mister Vince McMahon. Malgré tous ses efforts et ceux de son équipe, Makö en tête, Super Äxl était dans une impasse. Pour la première fois de sa vie depuis les affaires Vanger et Wennerström.

 

*

 

NALYSE DU RAW du 23 avril – Makö. Tandis que le fichier piraté se téléchargeait sur son MacBook Pro à 10MB par seconde, la jeune fille ouvrit le fichier de texte qui serait le réceptacle de son compte-rendu du jour. Depuis trois ans, l’équipe du journal Les Cahiers du Catch se relayait pour ne rater aucune des apparitions de Vince ou de ses sbires. Depuis trois ans, chaque image était analysée avec la plus grande précision et Äxl et ses amis répertoriaient un à un les éléments favorables comme défavorables à la WWE. Ce soir là, Makö comprit vite que quelque chose clochait : son téléchargement aurait dû prendre fin il y a deux minutes de cela, son MacBook ne pouvait pas se tromper. Elle-même ne faisait jamais d’erreur. Et pourtant, son ordinateur moulinait toujours. La vidéo du jour était donc plus longue que d’habitude. Perplexe, Makö se mordit la lèvre inférieure et se versa un café noir dans un mug orné d’une image de Bart Simpson.

Un rapide coup d’œil au fichier confirma ce qu’elle pensait. Le document qu’elle venait de hacker sur le net durait trois heures, le double d’une vidéo normale. Makö ne tenait plus en place et sentit l’adrénaline parcourir son petit corps malingre ; il s’agissait certainement d’une erreur de Vince : trois heures pour un go-home show, cela n’avait aucun sens. Elle fut tentée par l’idée d’appeler Äxl mais retint finalement son geste. Il s’était foutu de sa gueule avec ce voyage à Berlin et après quelques secondes de réflexion, elle décida de le condamner à attendre sa nalyse finale et formelle. Elle s’alluma une clope en se resservant un café et mit enfin son lecteur vidéo en marche.

Trois heures plus tard, elle écrasa sa dernière cigarette sur un morceau de pizza froide. Il était cinq du mat’ et elle avait besoin de dormir un peu. Elle envoya un texto à Äxl (« double temps d’antenne pour le Raw de la semaine, mais tu devras encore patienter un peu pour en savoir plus, Super Äxl ») et rejoignit son immense lit dans lequel elle s’endormit presqu’aussitôt. Dans ses rêves humides, Brock Lesnar énucléait John Cena à l’aide d’une petite cuillère.  

 

*

 

Dès huit heures, Makö était debout et s’attelait à la rédaction de son compte-rendu. Brock Lesnar. Ce mec était un véritable psychopathe, une montagne de muscles insensible à la douleur. Makö en avait vu d’autres, des tarés à moitié dégénérés, à commencer par son propre frère, mais des comme celui-ci, jamais. Même John Cena, qui avait pourtant affronté plus d’un monstre dans son existence, semblait être redevenu un enfant terrorisé par le noir depuis que sa route avait croisé celle du connard surpuissant. Le show de lundi dernier avait en effet été le théâtre d’un étrange spectacle. Celui mettant en scène la PEUR du Marine lors de la signature du contrat régissant les termes de leur match à Extreme Rules.

Cette signature, annoncée pour le début de show, n’eut finalement lieu qu’à la fin de Raw. Entretemps, Edge avait balancé une promo brillante de bout en bout, face à un John Cena muet et l’air encore plus idiot que d’habitude. Makö avait un petit faible pour le Canadien. De retour à la WWE le temps d’un lundi soir, il n’était là que pour une seule raison : discuter avec John Cena, ou plutôt lui asséner ses quatre vérités. Mais c’est au VRAI John Cena qu’il comptait s’adresser, celui qui fut son plus grand rival, celui qui le vainquit, fait rare dans carrière, lors d’un TLC, et devant son public ; pas à cette flipette à la mine défaite et au regard triste, humiliée chaque semaine depuis le come-back surprise de Brock le Dingo. Réveille-toi, Johnny, je ne suis pas là pour te demander de battre Lesnar à Extreme Rules mais pour te l’ordonner, lui dit en substance un Edge craquant comme tout  avec cette nouvelle coupe de cheveux, courte et plutôt élégante. Le Marine ne pipa mot et se contenta de conserver cet air légèrement niais et ce regard aussi expressif que celui d’une carpe qui le caractérisent. Alors que la Rated R Superstar quittait le ring, Makössi se mordit la lèvre inférieure, pensive. Le discours mobilisateur du Canadien ferait-il son effet ? Le public, lui, apprécia la promo et des chants d’encouragements à Johnny retentirent nettement dans l’arène.

Ce n’est qu’à la fin du show que le chemin de Lesnar et celui du Marine se croisèrent à nouveau, non sans que ce dernier n’ait au préalable fait durer un peu le plaisir : point de Cena lorsque my time is know retentit dans l’arène. Brocky, moqueur et satisfait de son petit effet (LA PEUR) sur le top guy de la WWE en profita pour présenter à Laurinaitis quelques exigences, une petite liste de conditions sine qua non à sa participation au combat de dimanche.

Ces connards de bookers ne s’étaient pas foulés, songea Makössi. Usage du jet privé de cette vieille crapule de McMahon, contrôle du show, changement du nom du programme TV (Monday Night Raw starrrrrrring Brock Lesnar)… Le segment rappelait furieusement celui où Vince O’Mac avait en vain tenté de retenir CM Punk l’été dernier, les kiosques à crème glacée en moins. Comme il fallait s’y attendre, Ace s’aplatit comme une merde et accéda aux caprices de sa Star au bord de l’overdose de stéroïdes. Et puis, my time is now retentit une seconde fois.

Makö, comme le public, s’attendait à une explication musclée lors de la signature de l’acte de décès de Johnny. Elle en était certaine, Cena, dopé par le discours d’Edge allait enfin passer ses nerfs sur l’immense connard. C’est tout du moins ce que la jeune femme aurait fait à sa place, à la différence que Brock serait sûrement déjà à l’hôpital si c’est Makö qu’il avait choisi de martyriser. A moins que Lesnar ne prenne les devants et brise la nuque de son adversaire avant de lui dévorer le cerveau en plein ring. Quoiqu’il advienne, il y aurait du sang, elle en était persuadée. D’ailleurs, le Marine n’avait-il pas pris le soin d’enrouler une lourde chaine autour de son poignet, en guise de poing américain ? Makö apprécia la scène et se resservit un large mug de café. Et puis, il ne se passa… RIEN. Les deux hommes se toisèrent, Lesnar, l’air plus arrogant que jamais, Cena, aussi inexpressif que d’habitude. Johnny signa et Lesnar se cassa. La jeune fille, fine connaisseuse de l’âme humaine avait lu la PEUR et le DOUTE dans le visage du Marine. Décidemment, elle méprisait ces deux connards incapables d’en venir aux mains alors que tout le WWE Universe n’attendait que ça.                 

Makössi était curieuse de voir ce que tout ce bordel allait donner. Un psychopathe dont le plus grand plaisir assumé était de botter des culs et d’infliger la douleur, aux « commandes » du show numéro un de la compagnie du Vieux, voilà qui la laissait pour le moins perplexe. Ça sentait le dérapage à plein nez, et peut être enfin quelque chose susceptible de faire avancer leur fichue enquête. Et puis, la PEUR dans le regard de Cena, le DOUTE s’insinuant dans le parcours du Marine… ce booking à des lieux du Superman auquel les bookers avaient habitué les suiveurs de la WWE la troublait. Certes, cela avait permis de réconcilier le public avec son héros (les lets go Cena lui avaient paru particulièrement appuyés, fait devenu rarissime depuis longtemps), mais à quel prix ? Alors qu’elle retranscrivait son analyse sur son MacBook Pro, elle songea à appeler Äxl à Berlin pour lui faire part de son sentiment mais reposa son téléphone. Foutu Super Äxl s’était foutu de sa gueule et la jeune fille rêvait encore trop de vengeance pour lui offrir ce petit plaisir.

 

*

 

Äxl avait du mal à sortir de son lit. Ils étaient arrivés à Berlin tard dans la nuit et Madame et le petit dormaient encore lorsque le journaliste se glissa enfin sous une douche brulante. En sortant de la salle de bain de sa chambre d’hôtel, il consulta sa messagerie électronique mais Makö ne s’était pas encore manifestée. Il tenta de chasser l’enquête de son esprit, se saisit de son sac-à-dos et en sortit une banane, pensif. Après tout, sa petite famille n’était pas encore réveillée, c’était le moment ou jamais de faire le point sur la vidéo du lundi précédent. Il se glissa doucement hors de sa chambre et composa le numéro de son amie.

–   Qu’est ce que tu veux, Super Äxl ? Tu te fais chier à Berlin ?

Lorsque la jeune l’affublait de ce surnom qu’il détestait tant, c’était rarement bon signe mais le journaliste, prudent, préféra ne pas relever.

– Bonjour aussi Makö. Je voulais juste m’assurer que tu avais réussi à hacker la séquence vidéo et savoir si tu avais du nouveau.

– J’ai la vidéo, ouais, grommela-t-elle. Un foutu go-home show de trois heures. Une vraie purge. Il ne s’y passe rien, les bookers ont fait un travail d’amateurs en allongeant un max’ les segments. C’était plein de vide et d’ennui, une vraie perte de temps. Mais on tient peut être quelque chose avec Brock fuckin’ freak Lesnar. 

Elle lui narra les séquences initiale et finale de la vidéo dans le détail et lorsqu’elle acheva enfin son récit, Äxl convint qu’il partageait les interrogations de sa partenaire. Il ne comprenait pas ce que la WWE comptait faire de Cena, dont le booking récent de présageait pas de lendemains chantant pour le Marine… sa défaite à Extreme Rules semblait inéluctable, quasi programmée, et même s’il était acquis que Lesnar gagnerait en trichant à l’issue d’un combat épique, l’avenir de l’ex Top Face de la fédération du vieux ressemblait à un énorme point d’interrogation. Une longue chevauchée solitaire vouée à l’échec ? Une disgrâce prolongée ? Une alliance avec Cihaime ? Plongé dans ses réflexions, il garda le silence quelques secondes, avant de relancer la jeune femme.

– Et du côté de Cihaime et de Jericho, du nouveau ? Une promo inoubliable avant l’explication finale dimanche soir ?

– M’en parle pas. Ridicule de bout en bout. Pourtant, ça avait pas si mal commencé, avec un bon match, un de plus, entre Chris et Kofi Kingston. Ces deux là s’entendent vraiment bien sur un ring, Vince devrait songer à leur filer quelque chose. Le Canadien a finalement réussi à contrer son adversaire d’un Codebreaker, a enchainé avec un Walls of Jericho et Kofi a finalement abandonné. Jamais j’aurais tapé pour si peu mais c’était un super combat. Et Tout le Mal est arrivé.

Äxl frissonna en entendant ces mots. Makö n’avait pas pour habitude de les employer à la légère ; elle s’en servait en général pour qualifier sa tentative de meurtre par immolation de son père.

– Raconte, murmura-t-il.

– Chris s’est pointé en backstage pour parler avec Johnny Ace. Et lui a dit que CM Punk était complètement bourré et devait être par conséquent dépossédé de son titre ; à son profit. Ce que Lauri s’est empressé d’accepter, et…

– C’est complètement con, Cihaime est straightedge, l’interrompit Axl. Et jamais il ne…

Makössi émit un grognement rauque et bruyant qui rappela à son compagnon qu’elle détestait être interrompue. Il ne termina pas sa phrase et attendit que la jeune fille reprenne le contrôle de ses nerfs.

– Je disais donc que ce connard d’Ace est entré dans le délire de Chris. Et Cihaime a été appelé sur le ring, pour passer un alcotest. Les flics étaient là, pour faire passer le test.

– Les flics ???

– Affirmatif, continua Makö. Et figure toi que ces connards de policiers américains sont trop stupides pour utiliser des testeurs électroniques… Ils font faire des petits exercices au présumé bourré.

La jeune fille garda le silence quelques secondes, fière de son effet.

– Ne me dis pas que… relança le journaliste, incapable d’oser aller au bout de son raisonnement, terrifié par ce qu’il entrevoyait.      

– Si. Justement. Cihaime s’est pointé sur le ring, titubant, frôlant la chute à plusieurs reprises, visiblement complètement bourré, quoi. Un peu comme toi la semaine dernière quand tu as voulu me défier à la vodka et que j’ai dû te porter jusqu’à chez toi, se moqua-t-elle.

Comme Äxl, vexé, ne relevait pas, Makössi continua, triomphante et satisfaite de sa petite pique.

– Ça ne tenait pas la route une seule seconde. Je ne me souviens pas d’avoir jamais vu Cihaime dans un segment aussi peu crédible et ridicule. Il a donc fait les tests, réciter l’alphabet à l’envers et marcher droit le long d’une ligne, et les a évidemment lamentablement foirés. Jericho se frottait déjà les mains de plaisir à l’idée de mettre la main sur le titre lorsque Cihaime a demandé une dernière chance. Je crois que tu devines la suite.

– Je pense, oui. Malheureusement, continua Äxl. Je tente ma chance : Punk n’a plus l’air ivre du tout, repasse les tests avec succès et pète la gueule à Jericho. Les flics ne bronchent pas, tout à leur trouille d’affronter McMahon pour si peu. CM Punk triomphe finalement en exhibant sa ceinture. Fin du segment.

– Ouais, c’est presque tout juste Super Äxl. Si ce n’est que, même quand il était censé réciter correctement l’alphabet à l’envers, Cihaime s’est planté sans le vouloir. Les mecs qui bossent pour le vieux con sont vraiment tous des connards, même ceux qu’on pense au dessus de la moyenne.

– C’est pas nouveau, Makö, ajouta le journaliste. N’oublie jamais que la moyenne dont tu parles, c’est celle de la WWE et son public analphabète. Pas la nôtre. Le fan de catch, quand il fait le même exercice, il bloque à partir de Z.

– Mouais, ronchonna la jeune fille. N’empêche que ce sont tous des connards. Moi, l’alphabet à l’envers, je le récitais à l’âge de 18 mois, en Suédois, Russe, Anglais, Français et Allemand. Ce segment était à chier Äxl, long comme un discours de Göd Mitterrandquïst et aussi stupide qu’un tweet de Nardine Moranöfsson, si tu vois ce que je veux dire.

Axl voyait parfaitement. Il changea brusquement de sujet.

– Et Kane ? Il profite de l’angle familial ?

– A fond, reprit Makö. Il en fait la faiblesse numéro un d’Orton comme je l’avais prévu. Ce je n’avais pas prévu, en revanche, c’est que les bookers du vieux con nous prendraient autant pour des crétins. Pendant la promo de Kane, Orton est apparu sur le titantron avec un  otage de marque, Paul Bearer en personne. Tu ne vas pas me croire, ce cinglé de Randy l’a foutu dans une chambre froide. Sauf que contre toute attente, Kane s’est marré et a déclaré qu’il n’en a rien à foutre. Plus tard dans la soirée, il est même venu « sauver » son père. Pour le mieux le refoutre dans son frigo en rigolant bêtement. Ce segment était stupide du début à la fin.

– Il nous refont le coup de la feud entre Edge et Kane ? Ça donne vachement envie de regarder Extreme Rules, soupira Äxl. Et les filles, ç’a donné quelque chose d’intéressant ?   

   – J’allais justement t’en parler. J’ai cru qu’on tenait un truc. Beth affrontait une des deux poufs’ Bella pour le titre dans un lumberjill match. Et sur une réception en dehors du ring, elle s’est tordue méchamment la jambe. Malgré la blessure évidente de Phoenix et la douleur qu’elle affichait, le match a continué et elle s’est logiquement inclinée sur roll-up. L’arbitre intervient, Beth se déchausse et pleure de douleur, un peu comme le jour où j’ai giflé Majör Tomsson. Tu te te rappelles ? Son truc sur la démocratie dans l’équipe ? Bref, à ce moment, je suis certaine que le vieux con a commis une erreur et qu’on va pouvoir l’attaquer pour blessure volontaire, en tant que chairman de la compagnie.

Äxl prévoyait une impasse de plus mais retenait tout de même son souffle tandis que la jeune fille reprenait le sien.

– Mais en pénétrant dans l’ordinateur de cette garce de Stephanie McMahon, j’ai vite compris que la blessure était kayfabe. J’ai confirmé sur le PC de Vince et sur ceux des bookers. Tout est bidon et elle sera à priori apte pour Extreme Rules. Je trouvais ça bizarre, aussi, qu’elle chiale comme un Majör Tomsson. Elle des couilles, Beth.

– La faire perdre avant le PPV, ça n’a pas beaucoup de sens. Tu penses que ça prépare l’entrée en scène de Kharma ? Qu’est-ce que tu as trouvé d’autres sur les PC de Vince et des bookers ?

– Rien de précis. En ce moment, le vieux salopard regarde One Night in Chyna cinq fois par jour. Quant aux bookers, c’est le calme plat. J’ai trouvé le scénario complet du prochain Raw mais rien de bien probant. « filer le micro à Cihaime et Chris », « Lesnar tabasse Cena et le laisse pour mort », « tester la nouvelle tenue bien bitchy des Bella Twins », c’est en gros ce qui nous attend la semaine prochaine.

Äxl soupira profondément. Ce Raw avait tout du go-home show pourri dont ils ne retiendraient rien.

– Heureusement, il nous reste notre pote funky Brody ! lâcha-t-il en rigolant nerveusement.

– Tu parles, il est mort ton Brodus Clay, ils lui ont collé le Nain dans les pattes. Ils dansent ensemble, s’habillent pareil. A mon avis, ils baisent ensemble. Même s’ils se sont imposés face à Ziggler et Swagger, tu peux dire adieu à son push.

– La Nain ? Celui de Pär Lagerkvist ?

– Non, celui de David Finlay, Super Crétin.

Mais Äxl n’eut pas le temps de se vexer. Il réalisa qu’il était en ligne avec Makössi depuis trente bonnes minutes au moins et tressaillit à l’idée que sa femme pouvait être maintenant réveillée. Il devint pâle en songeant à cette sombre perspective et abrégea subitement la conversation, prétextant une batterie défaillante et non son avoir demandé à son amie de lui envoyer le reste de ses commentaires par email dès que possible. Puis, il rentra précipitamment dans sa chambre en machouillant une banane, l’air le plus décontracté et naturel possible. Comme il le craignait, elle était réveillée et l’attendait, le regard noir. Un frisson lui parcourut l’échine. Décidemment, il détestait quand elle le regardait de la sorte.

– Salut chérie, bien dormi ? J’étais sorti m’acheter des bananes.

 

*

 

Makö avait hâte d’en finir avec cette foutue nalyse. Elle était terriblement à la bourre sur le timing du journal, ce qu’Axl avait eu la gentillesse de ne pas lui rappeler, elle détestait les rapports de shows dénués de tout intérêt et avait toujours terriblement envie de baiser. Il était 10h00 et elle comptait bien réveiller Säräh avec des croissants, du café chaud et un gode ceinture. Elle s’attela de suite à la tâche et synthétisa rapidement dans un email ce qu’elle n’avait pas eu le temps de raconter à Äxl.

 

De : Makossi

A : Axl

Sujet : Te fous plus jamais de ma gueule

 

Salut,

 

Comme convenu, je t’annexe la fin du rapport. Le fichier MNR_20120526 est crypté. Utilise la clé habituelle.

 

Makö

     

PS1 : Si ta femme s’adresse encore à toi en me traitant de tarée, j’enlève votre gamin et je lui fais voir les Teletubbies pendant tout un week-end.

PS2 : Te fous plus jamais de ma gueule. J’espère quand même que la visite du zoo plaira au petit.

PS3 : Je prie qu’elle se soit réveillée avant ton retour dans la chambre.

 

 

Document Réf. MNR_20120526 

 

Le Big Show et l’autre géant débile ont affronté Cody Rhodes et Alberto Del Rio. Les deux heels ont crânement défendu leur cause mais se sont finalement inclinés. Ils s’y sont très mal pris. A leur place, j’aurais profité de ma rapidité pour frapper le premier d’un violent et précis coup de pied dans les couilles avant de le travailler au visage, de préférence au menton et au nez. Puis, j’aurais bondi sur le second en lui écrasant mon marteau sur le crâne. A la WWE, je crois qu’on a le droit. Rien à signaler de plus, le match était pénible. Le Big Show est déjà invincible tout seul, alors associé à l’Énorme Débile… Il faudra tout de même surveiller leur relation. Tu dois savoir qu’ils se sont foutus sur la gueule pour de bon dans les vestiaires, il y a de cela quelques mois, Show reprochant à Khali de lui avoir piqué ses fameuses claques sur le torse. Si l’on en croit les rumeurs, l’Indien avait eu le dessus. A suivre, au cas où la WWE serait tentée de les faire combattre un peu ensemble avant d’en faire turner un qui se retournerait contre l’autre. Auquel cas, les bookers pourraient être tentés d’utiliser in kayfabe cette querelle de backstage.  

 

R-Truth était opposé à Lord Tensaï. Une victime de plus au tableau de squash du néo Japonais. Le push du Lord est toujours de rigueur et je n’arrive pas trop à voir ce que la WWE va en faire à terme. Un prétendant au titre intercontinental ? Si tel est le cas, gagnera-t-il ? Incarnera-t-il un nouveau champion heel dominant ? Ou se brisera-t-il sur le cobra de Santino en prélude à un dépush et une place de modeste midcarder heel ? Il faut qu’on y réfléchisse avec l’équipe, si tu veux mon avis, ça ne me parait pas encore bien clair et je n’ai rien trouvé dans le PC des bookers. A mon avis, ils n’anticipent pas à ce point et ne savent pas encore quoi faire de Tensaï. Si le public continue de dormir pendant ses apparitions, ça risque d’être vite réglé et Vince pourrait être tenté de le liquider pour de bon.

 

Dans cet océan de médiocrité, il faut admettre que même avec de grosses ficelles comme lundi dernier, la rivalité entre Sheamus et Daniel Bryan feat. Mark Henry est solidement en place. Le strongest man était donc opposé à l’Irlandais et Yes Yes Yes Man était l’arbitre spécial de leur affrontement. A la première occasion, Bryan a bien évidemment fait perdre Sheamus en comptant jusqu’à trois à la vitesse de l’éclair. Fin de segment classique : les deux se tapent sur la gueule. Cette fois ci, c’est Daniel qui s’impose et triomphe. Je ne sais pas si je t’ai dit, mais j’adore la prise de finition de Bryan. Je l’ai apprise, il faudra que je te fasse voir. Je l’essayerai sur toi à l’occasion.

 

Enfin, je pense qu’on peut déclarer l’acte de décès de la division tag team, l’électrocardiogramme est plat depuis trop longtemps pour qu’elle sorte de son coma. C’est une liquidation en règle. Lundi, Santino et Zack Ryder ont battu Primo et Epico. En quelque sorte, la WWE a coupé les machines, interrompu la respiration artificielle.    

 

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Lorsqu’Äxl reçut ce message sur son iPhone, il se trouvait au zoo avec le petit et sa femme. Il jugea plus prudent de ne pas lire son email immédiatement et prétexta une pressante envie d’uriner pour se soustraire au regard soupçonneux de son épouse. Ce n’est qu’une fois enfermé dans les toilettes, qu’il put lire les quelques lignes envoyées par Makö. Comme il s’y attendait, il ressortit déçu.

De retour auprès de sa petite famille, ils continuèrent leur visite  en direction de l’enclot à singes, l’animal préféré d’Äxl et de son fils. Dans les allées bordées d’arbres de l’immense parc qui abritait le zoo de Berlin, le journaliste regardait les babouins sans vraiment les voir. Makö avait tout de même déniché une information susceptible de pas mal changer la donne à la WWE et de pousser le clan McMahon à la faute. Ce psychopathe de Brock Lesnar avait désormais Raw sous sa coupe. Et il devrait y avoir du grabuge à court et moyen terme. Äxl sourit en songeant au jour où il coincerait cette ordure de Vince, car il le coincerait un jour. Il caressa affectueusement la tête de son fils émerveillé par le cours de reproduction offert par deux babouins, sortit machinalement une banane de sa poche et l’éplucha.

 

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L’email envoyé, Makö sauta dans un jeans, enfila un t-shirt noir barré de la mention « shut-up stupid dick », chaussa une paire de baskets et se précipita vers le box qui abritait sa petite moto 125cm3. Elle avait décidé de débarquer par surprise chez Säräh ; et de baiser pendant 24 heures non stop.


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