L’andouillette du dimanche

La politique, c’est comme l’andouillette, ça doit sentir un peu la merde mais pas trop.

Édouard Herriot

 

Après un Raw riche en péripéties et annonces diverses, le Smackdown de ce vendredi a voulu ralentir le rythme. En clair, ce fut un bon show centré sur des matchs de qualité, mais il ne s’est pas passé grand chose côté histoires, ce qui ne fait pas l’affaire du chroniqueur qui vous parle. Pas grave, c’est dimanche, on va causer un peu, de tout et de rien…

 

 

Et de moustache !

 

 

Nalyse de Smackdown du 22 février

 

La politique, c’est comme l’andouillette, ça doit sentir un peu la merde mais pas trop.

Édouard Herriot

 

Après un Raw riche en péripéties et annonces diverses, le Smackdown de ce vendredi a voulu ralentir le rythme. En clair, ce fut un bon show centré sur des matchs de qualité, mais il ne s’est pas passé grand chose côté histoires, ce qui ne fait pas l’affaire du chroniqueur qui vous parle. Pas grave, c’est dimanche, on va causer un peu, de tout et de rien…

 

 

Et de moustache !

 

 

Nalyse de Smackdown du 22 février

 

 

Oui, un drôle de Smackdown cette semaine. Une confrontation entre faces pour commencer, dont chacun est sorti satisfait ; des heels qui jouent à qui sera le plus heel ; des matchs solides mais qui ne font guère bouger les lignes ; et même des filles qui ont enfin des (tout petits) bouts d’histoire ! Le tout avec les nouveaux super-affreux en fil rouge, Zeb Colter et Jack Swagger, qui s’appellent en fait Wayne Keown et Jacob Hager, oui c’est important, mais nous y reviendrons.

 

C’est le futur adversaire et symbole du Mal selon Swagger qui a ouvert le show, Alberto Del Rio le gentil (je n’y croyais pas forcément mais ce turn est vraiment une réussite). Il a expliqué aux deux crétins, pardon aux deux conservateurs, que ce pays avait été créé par des immigrants et que sa réussite c’était ça, le rêve américain. Sur ce, Orton, le gentil aussi, est venu dire qu’il voulait sa revanche sur Swagger, qui l’a battu d’un rien à Elimination Chamber. Booker T. a donc gentiment annoncé le programme de la soirée des deux hommes : un match Champion vs Champion pour Del Rio contre Barrett, et un match contre Swagger pour Orton. Note pour plus tard : commencer un show avec deux faces même pas rivaux, c’est pas très drôle.

 

 

Pas de heels ET pas de barbus, c’est vraiment du travail d’inculte ça !

 

 

On enchaîna très vite avec le premier match du soir, opposant Sheamus à Damien Sandow ; ce dernier annonçant avant le match qu’il allait mettre fin au règne de terreur de l’Irlandais, rien que ça. Mais finalement, non. Sandow a perdu, Sheamus a donc gagné, et c’était bien entendu nécessaire pour lui. Car mine de rien il se retrouve un peu perdu dans la carte Sheamus : devenu l’an dernier un top face de la compagnie, il n’en est pas moins exclu de la course aux titres pour Mania. Il doit donc gagner des matchs ; mais dans le même temps Sandow a parfaitement résisté, et j’espère que lui aussi aura un bon match à Mania.

 

Venons-en à son ancien partenaire-sauf-à-l’occasion-quand-y-a-besoin-de-quelqu’un-pour-un-pre-show, Cody Rhodes. On l’a d’abord vu dans un segment coulisses avec Kaitlyn, les deux se sont croisés l’air un peu gêné, et Kaitlyn a avoué son penchant pour les belles moustaches – si, si, ça existe, ça s’appelle la folliculophilia (en tout cas d’après le Dr Barney Stinson). Bref, c’est tout simplement la meilleure storyline de l’année de la division féminine messieurs dames !

 

 

Une storyline ? Beurk, ça sert à rien ces trucs là.

 

 

En tout cas c’est un début de quelque chose, disons un brouillon, qui pourrait bien déboucher sur une story vaguement cohérente. Ou pas, évidemment. En tout cas on va garder un œil sur cette histoire, qui impliquerait un turn de Cody ou de Kaitlyn. Idem pour les relations entre la championne et sa copine Layla, qui ont fait équipe ce soir. Elles ont affronté le duo Aksana/Tamina, et c’est la première nommée qui a passé 80% du match dans le ring – les critères de qualité des divas sont impénétrables, ou au contraire très pénétrables, je ne sais plus (depuis que le pape a annoncé sa démission je ne suis plus sûr de rien en ce bas monde). En tout cas le match fut étonnamment acceptable, et ce sont les gentilles copines qui l’ont emporté.

 

Copines, oui, mais Layla a fait mine de récupérer la ceinture après le match, avant « bien sûr » de la rendre, sans pour autant détourner les yeux du gros papillon… Il y avait déjà eu de vagues prémices d’un turn de Layla il y a quelques semaines, voilà qu’il revient sur le tapis. À moins donc que ce soit Kaitlyn qui rejoigne le côté obscur et moustachu de la force… On devrait en tout cas avoir une storylinette féminine jusqu’à Wrestlemania, et qui sait la première défense du titre au Grandest-etc. depuis 2007 ; on n’en demande pas plus !

 

 

– À ton avis on y sera à Mania nous ?

– Faut voir, tu crois qu’il reste des tickets ?

 

 

Un détour en coulisses nous amena ensuite vers Zeb et Swagger, vite rejoints par Barrett qui leur affirma qu’il était bien d’accord avec leur discours sur ces salauds d’étrangers. Un immigrant qui devient aussi con que les autochtones, quel beau modèle d’intégration ! Ça n’eut pourtant pas l’heur de plaire à Colter, qui renvoya l’Anglais à ses origines d’envahisseur, et toc.

 

Dans le ring en tout cas Swagger dut se contenter d’affronter un Américain, Randy Orton donc. Une autre star dont on ne connaît pas encore le destin wrestlemaniesque, tiens – comme Sheamus, ce qui pourrait bien nous donner une affiche après le turn hypothétique mais annoncé de la Vipère (c’est qu’il nous reste pas moins de six semaines de Road les enfants !). Orton ne sort d’ailleurs pas affaibli de son match. Il a perdu, comme il se doit quand on affronte un prétendant au titre, mais il a plutôt dominé et n’a été vaincu que par un nouveau roll-up, comme à EC. Il reste donc haut dans la carte et c’est normal, par contre il va falloir que Swagger remporte des gros matchs plus facilement que ça pour apparaître comme une vraie menace pour Del Rio, tant il est vrai que pour l’instant c’est surtout par son gimmick hors normes qu’il se fait remarquer.

 

 

On ne montre pas du doigt, malpolis !

 

 

À force de Raw Rebounder et de Raw Rewinder, il ne restait déjà plus que vingt minutes de show quand… Miz et Cody apparurent, pour un petit match avant le main event. Petit mais costaud ! Rhodes a perdu le match mais a dominé son adversaire ; c’est sans doute grâce à sa moustache, rebaptisée « lovestache » car les femmes adorent ça, d’après lui. Bon, au moins Kaitlyn comme on l’avait vu, ce qui en matière de femmes est un bien joli résultat.

 

On en vint donc au main event, champion contre champion – sous le regard de Swagger et de son mentor. Ce fut une confrontation solide mais oubliable, la faute sans doute à l’absence d’enjeu réel. On n’eut même pas droit à une intervention des vilains, qui se contentèrent de regarder, Swagger se lançant après le match dans un violent… échange de regards avec son futur adversaire. Un heel avec son manager, qui viennent voir le match de leur ennemi, et aucun coup en douce, pas la moindre petite ruse dans le dos de l’arbitre ? Y a pas à dire : les conservateurs, c’est vraiment des tarlouzes.

 

 

Et en plus leur garde-à-vous n’est pas très réglementaire.

 

 

Voilà qui nous fait une transition idéale avec le bonus track de cette nalyse ! Car le numéro de duettistes Colter/Swagger ne se résume pas aux shows, loin de là. Comme d’autres catcheurs avant eux ils interviennent aussi sur You Tube, où ils déversent leur haine des pas-comme-eux et leur fierté d’imbéciles heureux qui sont nés quelque part. Je dois dire que je fais partie de ceux qui aiment quand la WWE s’aventure sur le terrain politique. Il n’est pas question de fond ici, des idées elles-mêmes, mais bien de cette petite lorgnette sur la société américaine que nous offre une grande compagnie de divertissement. La WWE n’est pas une thèse de sociologie en soi, mais par la façon dont elle traite certains sujets « sensibles » elle nous parle un peu de l’Amérique – sinon c’est BHL ou Labro qui en parlent, merci mais non merci.

 

Colter et Swagger sont donc sur You Tube. Bon. Et alors ? Eh bien vendredi dernier, le jour de Smackdown (et de l’anniversaire de ma tante mais ça n’a sans doute pas de rapport), ils nous ont offert une vidéo qui vaut franchement le détour, c’est peu de le dire et c’est par ici. Ça commence comme d’habitude, les deux hommes déversent leur haine devant le Gadsden flag, ce drapeau de l’Indépendance repris par les libertariens et le Tea Party, entre autres. Quand soudain…

 

 

… le Taker est revenu en house show !

 

 

Certes, mais ça n’a rien à voir. Quand soudain, disais-je, les deux hommes s’interrompent, se retrouvent devant un fond vert et quittent leurs personnages. Ils se présentent sous leurs vrais noms, et Colter/Keown explique le principe du catch, où on incarne des personnages pour faire réagir le public. Pourquoi cette leçon de choses ? Parce qu’il s’adresse alors directement à Glenn Beck, un vrai monsieur de la vraie vie, analyste et polémiste sur Fox News, conservateur de chez conservateur et qui, c’est amusant, se présente sur son site comme la fusion du divertissement et de l’illumination, rien que ça.

 

Glenn Beck a en effet son avis sur la WWE, et sur la gimmick Zeb/Swagger en particulier. En gros il reproche à la fédération de jouer contre son camp, qui est forcément pour lui celui des conservateurs, de la « middle America » que Beck prétend représenter. Keown lui reproche d’avoir insulté les fans de catch, qui sont plus divers qu’on ne le croit ; et il invite Beck a venir à Raw, dès ce lundi ! Bien sûr on peut s’interroger sur la véracité de la chose – Beck et la WWE se sont peut-être déjà mis d’accord. Mais ce Beck n’est pas vraiment un proche de la WWE, ni de Linda McMahon, qu’il qualifie de républicaine « progressiste », et dans sa bouche c’est vraiment une grosse insulte.

 

 

N’empêche, elle joue bien les shérifs quand même.

 

 

Pourquoi c’est intéressant cette histoire ? Déjà parce que c’est un coup de bélier dans le quatrième mur comme on en voit rarement (certes on n’est pas là dans un show WWE en tant que tel) ; quitter son personnage, reprendre son vrai nom et son vrai métier qui consiste à jouer la comédie, ça va plus loin que Punk en 2011 par exemple, qui n’a jamais été jusqu’à dire que le catch était scripté et qu’il était un « acteur ». Internet est utilisé à toutes les sauces par la WWE, et souvent jusqu’à la nausée avec cette avalanche de réseaux sociaux dans tous les coins ; ici on voit comment le Net peut au contraire apporter une nouvelle dimension à une histoire, et interagir de façon passionnante avec ce monde parallèle, le monde réel.

 

J’aime aussi cette histoire parce qu’elle nous montre la politique américaine sous un jour complexe, bien plus complexe qu’on ne le pense au premier abord vu d’ici. Eh oui, ce grand pays est plus profond que le cerveau de Chuck Norris ! Il y a les (gentils) démocrates et les (méchants) républicains, certes, mais ça ne s’arrête pas là et heureusement. Linda McMahon est la cible de Beck et c’est normal : un républicain du Massachusetts est sans doute souvent plus « à gauche », selon nos critères, qu’un démocrate du Texas. Beck évoque ses souvenirs de l’Iron Cheik, heel fameux des années 1980, mais là aussi les choses changent, l’Amérique change. La WWE l’a à mon avis mieux compris que les partisans du Tea Party ! Ces derniers tentent de faire revivre les années Reagan, alors que la première a compris et intégré qu’Américain et WASP n’étaient plus synonymes. Et le plus fort c’est qu’on peut aussi penser que, de même que nous adorons quand un CM Punk heel est sifflé pour dire la vérité, il y a sans aucun doute une partie du public qui approuve le discours de Zeb et qui prend plaisir à suivre ces segments pour ça… Le catch c’est magique ! Nous allons donc avoir un immigré fier de l’être face à un Américain bas du front à Wrestlemania, et j’ai hâte de voir quels nouveaux chemins va prendre cette drôle de storyline.

 

 

Déconne pas Jack !


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