World Wrestling Ecktertainment

If you can't beat them join them

You better do it 'cos it makes you feel good

Queen, If you can't beat them

 

Le journaliste américain Kevin Eck, du Baltimore Sun, où il tenait un blog très respecté portant sur le catch, Ringposts, a récemment annoncé qu’il quittait son journal pour rejoindre la Creative Team de la WWE, rien que ça. Lecteurs assidus des Ringposts depuis que nous nous sommes (re)pris de passion pour l’ignoble sport, fin 2008, nous ne pouvions pas laisser passer la nouvelle sans réagir.

 

 

Alors c’est à ça que ça ressemble, un Illuminati.

 

 

Quelques réflexions sur l’entrée de Kevin Eck à la Creative Team de la WWE

 

If you can't beat them join them

You better do it 'cos it makes you feel good

Queen, If you can't beat them

 

Le journaliste américain Kevin Eck, du Baltimore Sun, où il tenait un blog très respecté portant sur le catch, Ringposts, a récemment annoncé qu’il quittait son journal pour rejoindre la Creative Team de la WWE, rien que ça. Lecteurs assidus des Ringposts depuis que nous nous sommes (re)pris de passion pour l’ignoble sport, fin 2008, nous ne pouvions pas laisser passer la nouvelle sans réagir.

 

 

Alors c’est à ça que ça ressemble, un Illuminati.

 

 

Quelques réflexions sur l’entrée de Kevin Eck à la Creative Team de la WWE

 

 

Préambule : Je pense avoir lu la totalité des posts publiés sur Ringposts, et me décerne donc d’autorité un diplôme d’expert en Eckologie qui m’autorise pour ce papier à employer le nous de majesté, nananère.

 

Pour la première fois à ma connaissance, accède à la Creative Team un auteur qui a, des années durant, publié des centaines d’articles dans lesquels il exprimait ses opinions sur le produit fourni par la WWE. Aucun autre membre de ce club select et secret n’a révélé ses goûts en matière de catch avec une telle précision. Du coup, ça vaut carrément la peine de se pencher sur Kevin Eck: ses Ringposts livrent bon nombre d’infos sur la perception qu’a du business la dernière recrue de l’équipe cornaquée par la reine-mère Stephanie McMahon et officiellement constituée des discrets Brian Gerwitz, Ed Koskey et Tom Casciello et des moins discrets Pat Patterson et Ranjin Singh.

 

 

Pour info, voici la première réponse de Google Images quand on tape la recherche « WWE Creative Team ». Comme quoi, ça ressemble pas mal à la rédac des CDC, finalement.

 

 

Le passage de Kevin Eck de l’autre côté de la force nous a plongés dans des sentiments contradictoires. D’une part, pour avoir consulté quasi religieusement son blog depuis plusieurs années, nous tenons en haute estime ses idées créatives, qu’il a exposées à de multiples reprises, et sa vision globale du spectacle. Son incorporation à la Creative Team de Stamford constitue donc de notre point de vue une nouvelle des plus positives. De plus, le bonhomme paraît éminemment sympathique et sincèrement passionné : travailler pour la WWE était pour lui un rêve de gosse, et on ne peut que se réjouir pour lui. Mais, d'autre part, cette intronisation au saint des saints signe la fin de ses Ringposts, devenus pour nous une lecture quotidienne aussi impérative que stimulante. Il reste que, à tout prendre, on préfère perdre les Ringposts si on y gagne, en échange, une « Eckisation » de la WWE. Reste à savoir ce qu’un tel néologisme pourrait bien recouper.

 

 

J’ai une idée : un push sidéral pour tous les catcheurs aux cheveux teints en blond platine.

 

 

Qui es-tu, Kevin Eck ?

 

Pour ceux qui ne sont pas familiers du personnage, voici un court rappel de sa carrière. Passionné de catch dès l’enfance, le natif de Baltimore, Maryland, âgé aujourd’hui de 44 ans, a découvert très jeune les Arenas de sa ville, en compagnie de son daron. Enthousiasmé, il n’abandonnera jamais ce hobby enfantin. Optant pour des études de journalisme, il décroche à 19 ans un poste de stagiaire au Baltimore Sun, le principal quotidien de la cité rendue célèbre de ce côté-ci de l’Atlantique par la série The Wire. Au Sun, il travaillera des années durant comme journaliste sportif, couvrant spécialement les équipes locales de foot américain let de baseball, à savoir les Ravens et les Orioles. Il fait également passer des articles sur le catch quand le journal le lui permet.

 

A la fin des années 1990, il effectue une première fois le grand saut vers l’univers des rings en rejoignant l’équipe de WCW Magazine, le mensuel officiel de la WCW, qu’il contribue à faire évoluer vers une publication mi-kayfabe, mi-shoot, bien dans l’air du temps. Quand la WCW s’effondre quelques années plus tard, il se retrouve au chômage, mais rebondit rapidement à son alma mater, le Baltimore Sun, qui le réembauche dans ses anciennes fonctions. En 2007, le patron du quotidien lui propose de tenir sur le site du Sun, bénévolement, un blog consacré au catch. Eck hésite d’abord à accepter cette charge supplémentaire de travail, mais cède rapidement. Les Ringposts sont nés. Ses premiers articles ne sont lus que par les habitués du site du Sun, mais le bouche à oreille fonctionne rapidement au sein de l’IWC américaine. Des fans bienveillants accomplissent notamment un travail de fourmi en truffant d’innombrables articles catchesques de Wikipédia de liens vers les articles des Ringposts, attirant toujours plus de lecteurs.

 

 

Quinze ans plus tard, Kevin Eck va devoir travailler dans un environnement radicalement différent. Ou pas.

 

 

Que sont les Ringposts ?

 

Eck tient son blog quatre ans durant, de mai 2007 à août 2011, à raison de cinq ou six articles par semaine. Il y traite amplement de l’actualité de la WWE – reviews systématiques des ppv, de Raw, de Smackdown et de l’ECW jusqu’à sa fin au début de l’année 2009, mais aussi, plus épisodiquement, de Superstars, NXT et Tough Enough ; nombreux papiers annexes sur des sujets au goût du jour (du type « Réflexions sur la promo work-shoot de CM Punk » ou « Goldberg pourrait-il revenir à la WWE ? ») ; interviews « shoot » de la plupart des stars actuelles ou passées de la fédé (de Vince McMahon à John Cena en passant par Triple H, Randy Orton, Chris Jericho, Edge, The Rock, Steve Austin et tutti quanti) ; listes personnelles (les meilleurs matchs de Wrestlemania, les meilleurs parleurs du business, les plus grandes équipes de l’histoire, etc.) ; reprise d’informations officielles agrémentées de ses commentaires (« Cinq catcheurs licenciés par la WWE », « Rey Mysterio suspendu », « Heath Slater s’est cassé un ongle » et ainsi de suite) ; plus récemment, il a mis en ligne une série de vidéos dans lesquelles il parle, quelques minutes durant, parfois accompagné d’un invité, de tel ou tel thème. L’un de ses comparses récurrents est le catcheur Axl Rotten, dont le nom plus que glorieux a suscité à plus d’une reprise l’émoi de l’auteur de ces lignes, par exemple quand on lit ça dans les comms :

 

 

OK, mais je veux un jet privé, des tshirts à mon effigie et un gimmick de mutant cannibale.

 

 

Eck suit également la TNA, d’une façon assez curieuse : s’il regarde toujours Impact, qu’il ne manque pas de chroniquer, il ne visionne toutefois pas les ppv, expliquant ne pas en avoir le temps, tout simplement (grosso modo, le journaliste, qui rappelons-le tient ce blog bénévolement, est marié, et il a négocié avec bobonne un dimanche soir par mois consacré au catch, pas plus ; cet unique dimanche étant consacré à la WWE, il abandonne les ppv de la TNA, auxquels il consacre tout de même des recensions rédigées au vu des résultats). Tout comme pour la WWE, il interviewe régulièrement les stars du crû (Sting, Jarrett, Anderson, et ainsi de suite).

 

Faute de temps, et aussi sans doute faute de goût réel pour ces fédérations-là, il ne parle pratiquement jamais des fédés indépendantes américaines – ROH, Shimmer, Chikara, CZW, etc. ‑, pas plus qu’il ne tient ses lecteurs informés de l’actualité du puroresu japonais ou de la lucha libre mexicaine. Seule exception à sa focalisation sur les « big two » que sont la WWE et la TNA : son statut de journaliste d’une feuille de chou locale. Le Sun consacrre une large partie de ses pages à Baltimore et sa région, et Kevin Eck y contribue de son côté en publiant de temps à autre des infos sur la fédé de catch locale, la Maryland Championship Wrestling (MCW). Ami des promoteurs de cette fédé, il monte même sur le ring pour arbitrer un match par-ci par-là et, plus surprenant, pour régler une feud entièrement kayfabe montée avec un de ses collègues du Sun, qui sur son blog à lui avait ironisé sur le catch, spectacle selon lui réservé aux gays, aux enfants et aux bouseux. La feud de blog à blog mènera en bateau de nombreux suiveurs et s’achèvera par un combat à la MCW, qu’Eck remportera triomphalement, comme de juste.

 

 

Promo de Kevin Eck visant son collègue, en direct de son bureau. Admirez la pancarte « Rated Eck » qu’il s’est confectionnée : c’est sûr, cet homme est doté d’un redoutable sens du calembour.

 

 

Les Ringposts, blog d’un seul homme, ne doivent toutefois pas leur succès au seul Eck. En effet, la fonction « commentaires » y est très populaire, et il n’est pas rare de voir un post dépasser les 50, voire les 100 commentaires. L’annonce de la fermeture du site et du départ de son auteur à la WWE a même fait exploser le plafond : plus de 500 comms à l’heure actuelle, et ce n’est peut-être pas fini. Ces comms sont filtrés, c’est-à-dire qu’Eck doit les valider avant de les mettre en ligne, ce qui contribue à élever le débat, les posts vides ou simplement insultants passant généralement à la trappe. Eck écrivant dans un anglais soutenu et traitant du catch d’une façon équilibrée et parfois ironique, les Ringposts attirent généralement des lecteurs du même acabit. Si quelques comms du genre « JOHN CENA RULEZ !!! » se fraient parfois leur chemin jusqu’à la publication, la plupart s’efforcent d’apporter une valeur ajoutée. Bref, lire vraiment une review de show des Ringposts, c’est lire le compte rendu d’Eck, constellé de ses réflexions personnelles, puis lire plusieurs dizaines de commentaires parfois aussi longs que le post lui-même. Le maître des lieux répond d’ailleurs volontiers à ses lecteurs, ce qui crée un climat convivial assez éloigné de l’ambiance parfois délétère qui règne dans les comms d’un site par ailleurs admirable comme 411.

 

 

Quand même, y a pas à dire, la bannière des CDC est plus classe.

 

 

Kevin Eck, quelle est ta WWEltanschauung ?

 

Dans son post d’adieu, le bon Kevin ne s’est guère étendu sur les attributions qui l’attendent à la WWE. On sait qu’il intègre la Creative Team, guère plus. Le fonctionnement de cette instance est complexe, partiellement opaque, et souvent quelque peu aléatoire (lisez à ce sujet l’instructif papier que l’incomparable Spanishannouncetable a consacré à John Laurinaitis, de même que certaines précisions apportées par ce même Spanish dans les comms). Une chose est sûre : ce n’est pas parce que Kevin Eck en est devenu membre que, demain, la WWE va mettre en application toutes ses idées.

 

Cela étant dit, si la WWE est allée le chercher, c’est pas pour faire joli sur la photo de famille. Sa vision du catch est connue, et elle a dû sembler suffisamment intéressante aux têtes pensantes du Mordor pour qu’une proposition lui soit faite (ou que sa candidature soit acceptée, on ignore les détails de l’affaire). Bref, si la WWE prend Eck, c’est qu’elle entend faire du Eck, au moins partiellement. Alors, quelle est donc la vision que notre scribouillard a de la WWE ? (et avez-vous apprécié le super jeu de mots de notre inter-titre, surtout ?)

 

 

Pour ceux qui n’auraient jamais étudié la philo en allemand, voici la première réponse de Google Images pour « WWEltanschauung ». J’espère que c’est plus clair maintenant.

 

 

Entrisme de l’IWC ? Que nenni.

 

Un journaliste qui, de l’extérieur, couvre avec objectivité les activités d’une organisation ‑ et, parfois, en critique vertement les dérives et en moque les errements ‑ se retrouve embauché par ladite organisation. Le parallèle est tentant : Kevin Eck à la WWE, c’est comme si Jamel Attal (le patron et fondateur des Cahiers du Football) était embauché par la FIFA ; comme si Ignacio Ramonet (le directeur du très gauchiste Monde Diplomatique) intégrait le gouvernement Sarkozy ; comme si Michael Moore devenait le porte-parole de Halliburton… Eck, membre éminent de l’Internet Wrestling Community, va chambouler la WWE de l’intérieur et enfin réaliser les rêves des millions (AND MILLIONS) de bookers de canapé qui constituent l’IWC !

 

 

Notre agent à Stamford sera très surveillé.

 

 

Disons-le tout net, un tel fantasme, pour séduisant qu’il soit, est largement erroné.

 

Eck est certes l’une des voix de la nébuleuse que l’on appelle « IWC », mais il est très éloigné de la caricature du smart blasé qui ne jure que par l’Attitude Era pour les storylines et par la TNA (ou la ROH, ou la NOAH, ou le CMLL, chacun sa came) pour le spectacle in-ring.

 

Nous l’avons dit, ses Ringposts n’évoquaient pratiquement jamais les fédérations indy ou étrangères. Par manque de temps, certes, mais aussi par manque de goût. Si Eck n’a jamais pris une posture « à la Michael Cole » de détracteur du circuit indy et de ses produits – il ne tarit pas d’éloges sur CM Punk et Daniel Bryan, les deux plus éminents anciens de la ROH actuellement à la WWE, et ne manque pas de saluer l’inventivité et la qualité technique de la MCW locale  ‑, on n’a jamais senti chez lui le désir d’en apprendre plus sur cet univers-là. Il ne s’est d’ailleurs jamais posé comme un expert global du catch mondial. Ainsi, toutes ses listes de meilleurs performers, matchs, feuds etc. ne portent que sur les principales fédérations américaines, et il ne lui viendrait pas à l’esprit de comparer Shawn Michaels à Mitsuharu Misawa ou à El Hijo del Santo. De même, il trouverait risible de placer quelque idole indy type Austin Airies parmi les dix plus grands catcheurs des années 2000. Lui, c’est un connaisseur du catch américain mainstream, et il ne prétend pas à davantage.

 

 

Franchement, pourquoi s’emmerder à regarder les shows mex et japs quand on a Chavo et Yoshi sous le coude ?

 

 

L’une des obsessions les plus récurrentes d’une partie de l’IWC depuis cinq ou six ans est l’idée – largement discutable à nos yeux – d’après laquelle il y aurait dans le catch US mainstream d’une part une WWE infantilisée, vidée de sa virilité d’antan et tout entière vouée au culte de ces workers suspects que sont « John Cenaze » et « Blandy Boreton » et, d’autre part, une TNA plus adulte dans le discours et plus impressionnante dans le ring grâce à des hommes de la qualité de Kurt Angle, AJ Styles et Samoa Joe, sans même parler de l’époustouflante X-Division.

 

Là aussi, ceux qui espèrent qu’Eck, en sa qualité d’éminent IWCiste, se fera à Stamford le porte-parole des smarts pro-TNA et impulsera une TNAisation de la WWE, vont devoir déchanter. Eck reconnaît certes les talents de Styles et d’Angle, ainsi que d’autres performers de la TNA comme la Beer Money ou encore Matt Morgan, auquel il tresse des lauriers depuis des années, mais il se montre globalement très critique envers la fédération, ce qui lui vaut d’ailleurs de la part de certains lecteurs de récurrents procès en « pro-WWEisme » dont il se défend mollement. Il reproche avant tout à la fédé d’Orlando sa gestion globale extrêmement brouillonne et la marque de Vince Russo, qui multiplie les shock moments sans jamais se lasser et ne tient aucun compte ou presque de la continuité. Consterné par le règne de Hulk Hogan (et entré dans une feud personnelle avec son grand ami Bubba the Love Sponge), Eck voit la TNA comme un lointain second de la WWE, et ne va sans doute s’inspirer en rien des méthodes de la fédé à Dixie dans les storylines auxquelles il contribuera. Il serait également très surprenant qu’il tente d’incliner le spectacle in-ring de la WWE vers celui de la TNA (pour autant qu’on considère qu’il existe un « style TNA » plus axé spectacle et violence que celui de la WWE).

 

 

Probablement le genre de comm le plus fréquent sur les Ringposts.

 

 

Père d’une petite fille à qui il fait écouter ses compils de musiques d’entrée de catcheurs et qu’il espère sans doute amener prochainement assister à un Raw, Kevin Eck n’est pas un nostalgique de l’Attitude Era et de ses hectolitres d’hémoglobine. Il en regrette sans doute l’intensité, qu’il retrouve de temps en temps dans certains matchs actuels ; et il admet que, pour certaines feuds particulièrement haineuses, un peu de sang dans le combat décisif, surtout quand c’est un No Holds Barred ou un match en cage, ne ferait pas de mal. Mais il se souvient trop bien du bordel généralisé, du blading systématisé, de la grossiereté tenant lieu d’unique ligne de promo à bien des catcheurs, ou encore de l’overbooking maladroit propre à ces années-là pour exiger le retour de cette époque que d’aucuns considèrent bénie. Cela ne signifie pas qu’il serait un partisan béat des gamineries de l’actuelle PG-Era. Ainsi, il se tapait la tête contre les murs lors de l’emblématique feud Hornswoggle-Chavo, et plus généralement ne peut pas piffrer le nain et ses pitreries, pas plus que les concours à la con de NXT ou les séquences humouristiques consternantes du type Khali Kiss Cam. Bref, le père Eck est partisan de la PG Era, mais souhaiterait la voir débarrassée de quelques-unes de ses scories les plus embarrassantes. Après tout, les enfants de six ans ont des centaines de chaînes de télévision qui leur sont spécifiquement dévouées.

 

 

Oh non ! Le Nexus en ordre de bataille !

– Enzo-Dylan, tu regardes décidément trop la WWE avec papa.

 

 

Au-delà du catch en tant que tel, l’IWC critique également parfois la WWE pour le fond de son fonctionnement. Qu’il s’agisse 1) de son long silence sur le dopage et des ambiguités d’une Wellness Policy qu’elle n’a adoptée que contrainte et forcée ; 2) de sa propension à la limite du grotesque à incarner un roc de patriotisme américain ; 3) du statut professionnel instable de ses lutteurs soumis à des cadences infernales ; 4) de sa misogynie récurrente ; 5) de ses tendances homophobes, récemment dénoncées par la GLAAD ; ou encore 6) de son recours aux stéréotypes nationaux, voire raciaux… Kevin Eck n’a jamais été au premier rang de la contestation, loin de là. S’il s’est parfois désolé de telle ou telle dérive, il n’a jamais radicalement condamné la WWE pour tel ou tel des aspects sus-cités. Reprenons ces six points et voyons quelle est la position du bon Kevin là-dessus.

 

 

1) Le dopage

 

Ses Ringposts ont démarré une semaine avant que Chris Benoit n’accède post-mortem à la célébrité mondiale en tuant sa femme et son fils avant de se suicider. Dans l’immense controverse qui a suivi, Eck s’est surtout manifesté par ses agacements contre le torrent de critiques qui s’est abattu sur la WWE et le catch en général de la part du monde extérieur. Sans éluder complètement l’influence d’années de catch à haut risques sur la santé mentale de Benoit, il a défendu avec énergie l’industrie dans son ensemble face à ce qu’il percevait comme une attaque imbécile menée par des gens incapables de distinguer Steve Austin du Rock et un Armbar d’un Powerslam. L’homme Eck était naturellement horrifié par le coup de folie de Benoit, mais le fan Eck, corporate, a souhaité à son niveau défendre sa passion, qu’il sentait alors menacée dans son ensemble.

 

En quatre ans de Ringposts, il n’a jamais consacré d’article spécifique à la question du dopage, pardon, de l’accompagnement médical des catcheurs. En fait, sur ces questions, il a semblé suivre la voie impulsée par la WWE, saluant par exemple le bannissement des coups de chaise à la tête et prenant pour argent comptant la Wellness Policy.

 

 

2) Le patriotisme cocardier

 

 Sans jamais faire de son blog une tribune politique – ce n’était évidemment pas le lieu pour ‑, Eck a laissé entendre à plusieurs reprises qu’il était plutôt sympathisant démocrate. Il s’est, ainsi, agacé des multiples vannes de Matt Striker à l’attention d’Obama, entre autres exemples, et a égratigné à l’occasion l’administration Bush. Il n’empêche que, concernant le Tribute to the Troops ou d’autres grands moments de communion patriotico-militariste dont la WWE a le secret, il a toujours eu le petit doigt sur la couture du pantalon. Sa couverture du TTTT 2008, par exemple, semblait directement reprise du site officiel de la WWE.

 

 

3) Le droit du travail

 

Pas un mot sur le serpent de mer du syndicat des catcheurs de sa part, y compris lors de ses interviews de Mick Foley, célèbre militant de la cause.

 

 

4) La misogynie

 

Concernant les catcheuses, pardon, les Divas, Eck a certes regretté à plusieurs reprises la prime à l’apparence au détriment du talent pur, mais il a aussi, et bien plus souvent, partagé son enthousiasme de « mâle à sang chaud » à la vue de l’accoutrement minimaliste de telle ou telle bimbo. C’est bien simple, quand on lit ses lignes sur Kelly Kelly, on a l’impression qu’elles ont été écrites par Jerry Lawler.

 

 

5) L’homophobie

 

Il a paru hésiter quand la GLAAD s’est émue des propos de John Cena visant le Rock, et on ne va pas le lui reprocher : tout le monde n’a pas à avoir un avis tranché sur tout. Pour résumer sa position, on peut la rapprocher du point 1 : il admet que certaines blagues homophobes sont dispensables, mais s’irrite quelque peu de voir un organisme extérieur, en l’occurrence la Gay and Lesbian Anti-Defamation League, mettre son nez dans les affaires du catch.

 

 

6) Les clichés racistes

 

Les Ringposts datant de 2007, il n’y avait objectivement plus grand-chose à ce moment-là à se mettre sous la dent en matière de dénonciation du racisme à la WWE. Les Cryme Tyme, peut-être, dont le gimmick n’a jamais spécialement courroucé notre héros (en même temps, c’est compréhensible). Grand fan de MVP (eh oui), Eck n’a jamais été de ceux qui estimaient que sa couleur de peau expliquait qu’il n’ait pas percé le plafond de verre. Même point de vue sur les autres catcheurs noirs, comme Kingston ou Benjamin. Là aussi, on partage plutôt son avis, à vrai dire. On peut seulement noter que ce grand spécialiste de l’histoire du catch n’a jamais abordé le sujet des gimmicks outrancières passées à la Kamala, mais il est vrai que fouiller le passé ne fait pas partie des attributions premières de son blog. On aurait cependant aimé savoir ce qu’il avait pensé du personnage de Mohammed Hassan, par exemple…

 

Résumons : Kevin Eck est issu de l’IWC, et en a même fédéré une partie autour de son blog, mais il ne correspond en aucun cas à la quintessence du smart remonté contre la WWE actuelle tel qu’on se le représente. Au sein de l’IWC, son blog était peut-être l’un des plus prompts à défendre la WWE en de nombreuses circonstances (ou à faire silence sur certains dossiers épineux), et ses critiques ne portaient que sur certains moments précis de storylines ou de matchs. Il n’y a donc pas à attendre de sa part une révolution copernicienne. Eck aime la WWE telle qu’elle est, et ne souhaite sans doute qu’en corriger certains petits défauts sans rien changer de fondamental. Ce n’est pas demain la veille qu’un Japonais gay de 70 kilos spécialiste des prises de soumission issues du judo sera champion du monde à la WWE après avoir égorgé d’un coup de tesson de bouteille le champion sortant, Samoa Joe.

 

 

C’est en voyant ce pin’s au revers de la veste de Kevin Eck pendant une interview que Vince McMahon décida de l’embaucher.

 

 

 

Comment voit-il le catch ?

 

Pour ce qui concerne le spectacle entre les cordes, l’ami Kevin est un aficionado de ce qu’on appelle le « style WWE » ‑ c’est-à-dire que pour lui, la psychologie prime par rapport aux acrobaties, et les combats se doivent d’être aussi réalistes que les contraintes du sport-spectacle le permettent. Le no-selling qu’on constate fréquemment au Japon ou sur le circuit indépendant, très peu pour lui. Le spot pour le spot, ce n’est pas ce qui le fait vibrer. S’il sait apprécier à sa juste mesure quelque séquence insensée, du type Jeff Hardy sautant d’une échelle sur CM Punk allongé sur une table, ou quelque spidermanerie de John Morrison, il goûte ces moments avant tout en cela qu’ils contribuent à ce qui constitue pour lui l’alpha et l’oméga d’un bon match : une cohérence globale qui permet au spectateur de ne pas suspendre sa crédulité très haut.

 

Par exemple, Eck grince sérieusement quand dans un Ladder Match, les catcheurs vont passer un temps fou à installer aux abords du ring tout un tas d’échelles dans le but évident de préparer un « high spot », alors que la logique voudrait qu’ils ne perdent pas ces précieuses minutes en préparatifs aux résultats improbables. De même, il lève les yeux au ciel quand dans un Steel Cage Match, un catcheur va tenter quelque manœuvre périlleuse alors que son adversaire est hors service et qu’il pourrait simplement sortir par la porte. Eck veut l’émotion, mais une émotion venue de la tête plus que du cœur : plutôt « waaah, X se sacrifie pour Y alors même que la fidélité de Y à son égard est douteuse, comme c’est noble », que « waaah, X et Y viennent d’enchaîner 25 Canadian Destroyers de suite, quel exploit athlétique ». Bref, si Eck a un droit de regard sur ce qui se passe dans le ring, alors on n’est pas près de voir des modifications substantielles du mécanisme auquel on est habitués : phases de domination alternées, recherche du finisher, contres, nearfalls de plus en plus crédibles, pin.

 

Secundo, pour ce qui est des storylines en tant que telles, Eck manifeste le même penchant pour la cohérence. C’est cette obsession chez lui qui nous fait le plus saliver : combien de fois nous sommes-nous désolés de voir des catcheurs se conduire de façon incongrue au vu du déroulement de l’histoire et des caractéristiques qui leur sont prêtées ? Ce genre d’incohérences, la WWE en produit treize à la douzaine d’une semaine à l’autre. Combien de feuds brusquement achevées sans qu’on n’en ait la moindre justification ? Combien de réactions absurdes, qui ne cadrent ébsolument pas avec le personnage ? Un exemple parmi mille, tiré d’un Ringpost traitant d’un épisode spécial draft : « I never understood why the talent on a specific brand gets so excited when they pick up a draft pick and so upset when they lose one. I would think the reaction would be the opposite. If I’m a wrestler on Raw and Orton gets sent to Smackdown, I’m doing cartwheels because I no longer have to compete with him. Conversely, if I’m on Smackdown, I’m upset that I now have to contend with Orton. »

 

Si Eck, qui a toutes ces atteintes à la logique en horreur, est écouté, on devrait en voir moins. Le spectacle y gagnera, car on sera davantage happés par des récits crédibles que par des scénarios qu’on croirait parfois écrits par des attardés mentaux ivres.

 

 

« Attardés mentaux ivres », je vais la ressortir celle-là.

 

 

A student of the game

 

Cette expression, « student of the game », correspond pleinement à Kevin Eck. Elle signifie à peu près « personne qui a attentivement étudié un domaine donné ». Eck, venu au catch vers le milieu des années 1970, en connaît l’histoire (américaine s’entend) sur le bout des doigts, et lui voue un profond respect. Il est ainsi un fan absolu de Bruno Sammartino, le premier champion de la WWWF, qui a détenu le titre suprême pendant onze ans au total. L’ombrageux Sammartino a rompu avec la WWE il y a bien longtemps, et refuse catégoriquement d’être intronisé au Hall of Fame. Eck est de ceux qui oeuvrent pour que son culte vive (on ne l’a jamais lu aussi ému que lorsqu’il a organisé à Baltimore un dîner pour certains de ses lecteurs autour de son idôle aujourd’hui septuagénaire).

 

Eck était adulte et travaillait dans le business pendant les Monday Night Wars, mais il se souvient parfaitement de la Rock n’Wrestling Era et même de la décennie précédente. De cet âge d’or peut-être mythifié (les matchs de l’époque Sammartino, encore très proches de la lutte, nous endormiraient probablement), il a gardé certaines convictions fortes, au premier rang desquelles celle que la simplicité est la mère du succès. Il faut un bon, un méchant, et une histoire plus ou moins élaborée qui les oppose. Certes, Eck tient compte de l’évolution initiée, selon la légende, par Steve Austin un soir de victoire au King of the Ring en 1996 : la recette infaillible des années Sammartino, puis Hogan, était usée jusqu’à la corde, et l’anti-héros Austin a apporté un nouveau souffle au business, il le reconnaît. Il admet, aussi, que pour qu’une feud soit réussie, le méchant doit apparaître persuadé de son bon droit (donc d’un certain point de vue humanisé). Mais au fond de ses papiers, on a souvent perçu une certaine défiance à l’égard des « nuances de gris », dont il redoute que, à haute dose, elles finissent par brouiller trop de repères.

 

Ce n’est pas qu’il estime que tout doit nécessairement être platement manichéen ; mais pour lui, les storylines « shades of grey » doivent être l’exception, et pas la règle. Même position concernant le procédé dit du « worked shoot » : sans doute encore marqué par sa collaboration avec la WCW de Vince Russo, où le wroked shoot était la règle, Eck estime que cette méthode doit être employée avec la plus grande parcimonie – là aussi, afin de ne pas trop désenchanter le public, qui est venu là pour assister à un spectacle, pas pour qu’on lui révèle l’envers du décor. C’est l’un de ses griefs récurrents envers la TNA, qui a depuis longtemps effacé la ligne de démarcation séparant le work du shoot : pour Eck, en gueulant pratiquement « tout ça est scripté » à l’antenne, les protagonistes de l’Impact Zone détruisent le fondement même du catch, à savoir le consentement du public à être mené en bateau.

 

Bref, si Eck avait été aux commandes au moment où a démarré l’actuelle feud Cena-Punk, précisément fondée sur le worked shoot et les nuances de gris, cette feud aurait sans doute tout de même eu lieu ; en effet, l’ami Kevin a, comme tout le monde, adoré cette histoire. Mais on n’en aurait pas une comme ça tous les trimestres, pour sûr.

 

 

– Moi, Jacob Novak, je suis éliminé de NXT ? Eh bien sachez que NXT est scripté et que tout est déterminé à l’av… couic.

Bien joué, Matt.

Merci, M. Eck.

 

 

Autre conséquence de sa déférence envers les temps anciens : le respect dû aux titres. Eck n’aime pas le « hotshotting » (le passage rapide d’un titre d’un porteur à l’autre). Devenu accro au catch à une époque où il n’y avait qu’un seul champion du monde, un seul show hebdomadaire, quatre ppv par an et des défenses de titre aussi rares que prestigieuses, il tire toujours un peu la gueule quand un titre, spécialement de champion du monde, est défendu, et a fortiori cédé, lors d’un simple weekly. Pour lui, ce traitement dévalue l’importance du titre et des champions. S’il a voix au chapitre sur ces questions-là, gageons que les runs de champion seront plus longs qu’aujourd’hui. Ce même respect de la tradition se manifeste dans sa vision d’un monument comme la Streak de l’Undertaker, dont il considère qu’elle ne doit en aucun cas être rompue. Pareillement, un catcheur partant officiellement à la retraite doit se montrer fidèle à sa parole : très ému par le match d’adieu de Ric Flair, il a été consterné par son retour dans les rings. Aussi fan qu’il soit d’un Shawn Michaels, il ne militera sans doute pas pour que le Heartbreak Kid décroche ses santiags du clou.

 

Le traditionnaliste en Eck regrette également la perte de prestige des titres secondaires et spécialement du championnat Intercontinental. Il fut un temps, rappelle-t-il souvent, où le titre de champion du monde revenait à la plus grande star et le titre intercontinental au meilleur technicien. Et de citer pour exemple l’époque où Hulk Hogan trustait la ceinture de champion du monde tandis que des Randy Savage et des Ricky Steamboat se battaient pour la breloque à la mappemonde. Ces dernières années, on aurait du mal à citer un run notable d’un champion IC ou US. Il faut probablement remonter à Chris Jericho 2009 pour trouver le dernier champion intercontinental réellement marquant ; quant au titre US, on pense au Miz 2010, mais ne valait-il pas autant, voire plus, par sa mallette de Mr MITB et ses ceintures de champion par équipe ?

 

Même constat pour les titres par équipes. Comme tout le monde ou presque, Eck regrette le temps où une dizaine d’équipes régulières faisaient le spectacle à la WWE, et ne peut que hocher tristement la tête en voyant que les champions actuels sont Otunga et McGillicutty, et leurs challengers les plus probables, Santino et quelque allié de circonstance type Yoshi Tatsu. Il déplore la multiplication des équipes de catcheurs voués à une carrière en solo, qui passent quelques semaines ensemble avant de repartir chacun de son côté, comme récemment les champions Kane et Big Show ou encore Rhodes et McIntyre, et souhaiterait le retour de vraies équipes constituées et unies dans la durée.

 

Signe de leur déconfiture, les titres Intercontinental, US et par équipes n’ont même pas été défendus cette année à Wrestlemania (le combat pour le championnat US ayant tout de même, quel honneur, été programmé en dark match). Si Eck en a l’occasion, il s’efforcera de rendre à tous ces titres secondaires leur lustre d’antan. Comment ? A l’ancienne, évidemment : en offrant aux champions des règnes significatifs, c’est-à-dire longs et constellés de défenses victorieuses, et en leur faisant vivre de vraies feuds bien écrites, se déroulant sur plusieurs semaines voire plusieurs mois et couronnées par de nombreuses promos. Bref, en les traitant presque comme les championnats du monde.

 

 

– C’est bon pour nous, ça, David, hein ?

– Pas sûr, Michael, pas sûr.

 

 

De la même façon, Eck aimerait sans doute contribuer à ranimer quelque peu la division féminine, lui qui s’est désolé deux ans durant du traitement de chien infligé à la talentueuse Gail Kim et souhaité sans trop y croire que Beth Phoenix et Natalya, les meilleures filles du roster, dominent réellement le circuit. Avec l’intronisation des Divas of Doom et le retour à longue échéance de Kharma, il est même permis d’y croire. Mais si Kevin le mâle à sang chaud a son mot à dire, c’est pas demain la veille que Kelly Kelly et autres Maryse se feront wish well leurs futurs endeavours.

 

Enfin, il se montre sceptique face à l’inflation des Gimmick Matchs, qu’il voudrait probablement rendre plus rares, et donc plus marquants. Moyennement emballé par les ppv à thème type Hell in a Cell, il estime que les combats doivent le plus souvent se régler « à l’ancienne », les stipulations devant toujours être justifiées par la storyline et pas imposées sans raison.

 

 

Et il aime qui, cet homme-là ?

 

Ca tombe bien : Kevin partage globalement les orientations de ses nouveaux collègues de la Creative Team. Ainsi, il éprouve le plus profond respect pour les têtes de gondole John Cena et Randy Orton, qu’il considère comme deux professionnels accomplis, toujours à la hauteur des attentes. D’ailleurs, il n’hésite pas à souligner les qualités du très décrié Cena, affirmant régulièrement que ceux qui lui crient « You can’t wrestle » n’entravent strictement rien au catch. Par ailleurs, il aimerait beaucoup voir un heel turn du Marine, mais semble conscient de la difficulté de l’affaire. Voici ce qu’il écrivait il y a un an, et son avis n’a sans doute guère changé : « I think a heel Cena would give WWE a shot in the arm from a creative standpoint – but I really don’t see WWE turning a guy who is its top merchandise seller and has a squeaky clean public image due to his charity work and vocal support of the U.S. military. »

 

 Il est également très fan de CM Punk, et cela depuis bien avant son heel turn de l’été 2009. De même, il était ravi du retour de Christian début 2009 et se félicite de son statut nouveau de main eventer. Pour le reste, il apprécie beaucoup Rey Mysterio, Alberto Del Rio, John Morrison, Jack Swagger, Kofi Kingston, Dolph Ziggler, Wade Barrett et Daniel Bryan, de même que le nouveau Cody Rhodes. Et s’il a longtemps été plus que sceptique sur le Miz et Sheamus, il a fini par succomber à leur charme. Autant d’opinions partagées aussi bien à Stamford que dans l’IWC, en somme. Insistons sur Morrison et Kingston, qui plafonnent un peu depuis deux ans : pour Eck, le Shaman, malgré ses lacunes au micro quand il assume un rôle de Face, a un potentiel de champion du monde indiscutable ; Kingston, lui, n’a pas encore eu l’occasion de livrer une feud sérieuse depuis celle, réussie, qui l’a opposé à Orton en 2009. Eck croit énormément à ces deux gars-là, et les pushera à l’occasion.

 

Bref, il apprécie à peu près tous les main eventers et midcarders actuels, et seuls les super big men semblent l’ennuyer un chouïa : le personnage du Big Show lui semble vidé de tout sens, à force d’avoir trop turné. De même pour Kane. Il est plein de déférence pour la carrière de l’Undertaker, mais ne semble nullement pressé de le voir revenir. Evidemment, il ne peut pas voir le Great Khali en peinture et n’a jamais trouvé le moindre intérêt à Vladimir Kozlov. Et il a toujours professé une indifférence polie envers Mark Henry, bien que le récent Brutal Turn du mastodonte l’ait poussé à revoir son jugement. Car comme pour les cas Sheamus et Miz, le gars Eck est capable de changer d’avis et d’admettre de bonne grâce s’être montré injuste envers tel ou tel performer. Bref, les rares catcheurs qu’il n’apprécie pas spécialement n’ont pas trop à s’en faire : il n’est pas buté et peut très bien mettre en valeur demain un gars qui ne lui semble pas trop convaincant aujourd’hui. Quant à ceux qu’il aime, et qui constituent la majeure partie du roster, ils ne peuvent que se réjouir de l’arrivée à la Creative Team d’un fan déclaré, qui aura à cœur de ciseler leurs personnages pour les rendre crédibles et intéressants. Enfin, Eck aime les grands anciens, que leur départ soit plus ou moins récent (du Rock à Edge en passant par Piper et évidemment Michaels, son catcheur favori toutes époques confondues) et souhaitera sans doute les solliciter pour éclairer les jeunes pousses de leur aura intacte.

 

 

John, je vais t’apprendre à coupler ton « You can’t see me » à l’indispensable « Tu sens mon doigt ? Tu vois mes mains ? »

 

 

Au final, quand on y regarde de près, le push de Kevin Eck n’a rien d’étonnant. Le bonhomme connaît le business, il est un fan loyal de très longue date de la WWE, et ses critiques ont toujours été bien plus conjoncturelles que structurelles. Eck est WWE, jusque dans l’apparence, serait-on tenté de dire : adepte des salles de muscu et des cheveux teints en blond platine, il paraît dix ans de moins que son âge et ne déparerait pas sur une photo commune du roster. Quelle que soit l’étendue de ses prérogatives, il ne bouleversera pas Raw et Smackdown, saura s’adapter aux désideratas de Vince, Triple H, Stephanie, etc., et sera déjà heureux d’apporter sa touche à quelques storylines pour les rendre plus cohérentes.

 

La WWE l’a sélectionné car elle est sans doute elle-même consciente de certaines de ses failles, et reconnaît la justesse des arguments déployés par le blogueur dans ses Ringposts depuis quatre ans. A charge pour Kevin de ne pas devenir un de ces « Yes Men » épinglés par CM Punk et de rendre ce produit auquel il voue un amour sincère encore meilleur. Il a les qualités pour, à n’en point douter – mais, une fois de plus, n’attendons pas de sa part une transformation fondamentale, plutôt des correctifs légers. En sa personne, la WWE n’a pas engagé un savant fou à la Russo mais un artisan appliqué. Tant mieux : depuis un an maintenant, et en dépit de quelques sorties de route, le spectacle est excellent, les storylines (du moins en main event) passionnantes et les ratings en hausse. Qu’Eck mette un peu d’huile dans les rouages, renforce un peu les feuds de midcard et d’undercard et redonne un peu de clinquant aux titres secondaires, et on sera entièrement satisfaits. Il est frustrant de se dire qu’on ne saura jamais que telle ou telle histoire est signée Kevin Eck, mais on se fera fort de tenter de reconnaître sa patte à l’occasion !

 

 

Anticipation de ce que sera vraiment son rôle : Kevin Eck proposant un nouveau concours pour l’épisode 589 de la saison 5 de NXT.


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